Quels réseaux et quels mondes virtuels pour demain sous la double contrainte énergétique et climatique ?

Le think tank The Shift Project a publié une nouvelle étude en lien avec le numérique et la double contrainte énergie-climat : “Mondes virtuels & réseaux face à la double contrainte carbone”. Découvrez vite leurs principales conclusions !

Le think tank The Shift Project, dédié à la transition bas carbone, a initié depuis 2018 un programme de travaux sur le numérique, conscient qu’il s’agit d’un enjeu majeur dans le défi que représente le changement climatique.

Deux nouvelles études ont été publiées en mars 2024, regroupées sous le titre de “Mondes virtuels & réseaux face à la double contrainte carbone”. Vous pouvez retrouver l’ensemble des rapports et synthèses sur la page de présentation de l’étude du Shift Project.

Quels mondes virtuels pour quel monde réel ?

Le premier rapport porte sur l’engouement pour les mondes virtuels et les impacts induits par cet enthousiasme pour le métavers et autres univers technologiques immersifs.

L’étude propose dans un premier temps des caractéristiques permettant de définir un monde virtuel : 

  • Simultanéité : donne l’impression d’interagir en temps réel
  • Immersion : plonge l’utilisateur dans un environnement virtuel
  • Virtualisation : produit des représentations virtuelles et fournies du monde réel
  • Persistance : fait exister et se transformer l’environnement virtuel même en l’absence de l’utilisateur
Simultanéité, Immersion, Virtualisation, Persistance

A cela s’ajoute des caractéristiques qui vont dimensionner les impacts liés au déploiement de ces univers virtuels : 

  • La possibilité de commercialiser des biens dans le monde virtuel
  • La nécessité d’avoir un système de grande taille pour que les services promis soient rendus
  • La possibilité d’avoir accès aux services n’importe où et tout le temps
  • L’intrication entre le monde virtuel et le réel

Il apparaît que certaines combinaisons sont incompatibles avec une trajectoire maîtrisée des impacts environnementaux du numérique. Ainsi, un déploiement indifférencié et généralisé des univers virtuels nous fait sortir du scénario tendanciel de l’étude Ademe-Arcep sur l’évolution de l’empreinte environnementale du numérique que nous avions analysée dans la newsletter de mai 2023. Cela nous mènerait vers le scénario “Pari Réparateur” de l’étude.

L’étude conclut sur la nécessité d’avoir une évaluation systématique, quantifiée et exhaustive (Analyse du cycle de vie multicritères et multi terminaux) et segmentée afin de répartir les impacts par fonctionnalité ou axe technologique afin d’éclairer au mieux les prises de décisions, notamment selon la matrice proposée en image ci-dessous et dont la description est disponible dans le rapport complet de l’étude “Quels mondes virtuels pour quel monde réel ?”.

Matrice usages des mondes virtuels


Des réseaux sobres pour des usages connectés résilients


Le second rapport se concentre sur les réseaux et plus particulièrement sur les réseaux mobiles. 

L’étude rappelle que les usages et les infrastructures réseaux sont les deux faces d’une dynamique qui s’auto-alimente : les nouveaux usages nécessitent de nouvelles capacités au niveau du réseau (effet d’usage), et les nouvelles capacités des réseaux permettent de nouveaux usages (effet d’offre).

En France, ces réseaux représentent 5,5% de l’empreinte carbone du numérique, et d’un point de vue énergétique, la consommation des 4 principaux opérateurs s’élève à 4TWh en 2021, dont près de 60% pour les réseaux d’accès mobile, soit la consommation de 3 millions de foyers environ (d’après la même étude Ademe-Arcep citée précédemment).

Le groupe de travail s’appuie sur le développement d’un nouveau modèle paramétrable permettant de quantifier les conséquences énergie-climat des choix de déploiement des réseaux. À l’échelle de France, un déploiement indifférencié et généralisé de tous les usages intenses en données (mondes virtuels, objets connectés, IA, etc…) pourrait engendrer une augmentation de la consommation électrique du réseau mobile de 4TWh entre 2020 et 2035, soit x2,5 sur la période.

Pour éviter une telle explosion, l’ensemble des acteurs doivent activer conjointement les leviers d’écoconception et de sobriété. Les efforts d’éco-conception seuls ne suffiront pas à maîtriser les impacts environnementaux.

En conclusion de ces deux rapports, les recommandations sont très similaires : 

  • Mesure et transparence
  • Optimisation 
  • Réorganisation collective vers la sobriété
  • Formation et compétences


Une conclusion qui souligne encore une fois l’importance de changer notre grille de lecture afin d’allouer les ressources nécessaires à la prise en compte des enjeux systémiques pour garantir la résilience à long terme.